Je vais à présent continuer de partager les choses que m'a transmises Akira.
Pas facile de sélectionner son thé quand on arrive chez un producteur. D'après Akira, il est assez fréquent surtout au début, quand il ne vous connait pas, qu'il vous teste en vous faisant goûter plusieurs thés de qualités différentes. L'aspect des feuilles n'étant pas toujours éloquent, seule l'aptitude à détecter la qualité permettra de s'en sortir. Et il est important de ne pas se tromper pour que soient dévoilés les meilleurs thés disponibles, une manière pour les producteurs de sélectionner les vendeurs qui seront dignes de mettre en avant leurs meilleurs thés, qui savent de quoi ils parlent.
Pour nous autres simples consommateurs, être à même de détecter la qualité pourra s'avérer utile pour sélectionner notre thé, mais aussi pour apprécier d'autres liqueurs, nourritures, parfums, etc. C'est loin d'être une obligation bien entendu, mais cela en intéressera peut-être certains. À ma grande surprise, avec un peu d'entrainement et une bonne méthode - et un bon mentor dans mon cas - ce n'est pas si difficile que ça en a l'air.
En gros, ce qui va être important, c'est la notion de direction. Comme déjà évoqué, l'aftertaste va surtout se sentir au niveau de la gorge. Il en sera de même pour la détection de l'aftertaste par l'odorat. Rappelons au passage que l'air qu'on inspire par le nez passe directement dans la gorge.
En gros, pour un thé n'ayant pas un fort aftertaste, lors de l'inspiration les arômes se sentiront au niveau du nez, ils monteront verticalement pour imprégner les fosses nasales. Au contraire, pour un thé ayant un fort aftertaste, le flux d'air à l'inspiration se ressentira plus horizontalement comme allant directement dans la gorge. D'où cette notion de direction. Un thé qui monte : pas d'aftertaste ; un thé qui descend : bon aftertaste.
Akira m'a dit qu'en général, plus la plantation est belle, moins bon est le thé.
Cet endroit n'est pas l'exception confirmant la règle...
Il est important de noter qu'il est très difficile de se rendre compte de ce phénomène sans comparer systématiquement deux thés, du moins au début. Le mieux est d'avoir un thé dont on sait où il se situe sur l'échelle de l'aftertaste et de comparer systématiquement. On renifle un thé trois fois, en entrecoupant chaque inspiration par une respiration de l'air ambiant pour ensuite revenir aux feuilles, puis on sent l'autre thé. Les différences seront bien plus évidentes ainsi. Surtout, on essaie de faire fi du caractère du thé, pour se focaliser sur la direction ressentie.
Il est plus facile au début de sentir des feuilles infusées encore chaudes, par exemple dans un zhong. La chaleur aide. Les feuilles sèches sont plus dures à juger et demandent plus d'entrainement. Mais si on est sérieux et régulier, on pourra même repérer les différences entre ses théières juste en les remplissant d'eau chaude, en les vidant et en comparant les vapeurs qui s'en dégagent.
Figuier sauvage dans la Rainforest...
... protégé par des fourmis vraiment pas sympas...
... surtout quand on porte des tongs...
Au final, tout peut se juger ainsi : choisir ses fruits et légumes sur le marché, apprécier un alcool, etc. Rappelons que le sens de l'odorat est responsable à 90% de l'appréciation du goût. Pas étonnant qu'on puisse détecter quasiment tout par le nez.
Encore une fois, un amateur de thé n'aura pas foncièrement besoin de ce genre d'entrainement. Il boira ce qu'il veut, ce qui lui plait. Personnellement, ça m'éclate alors je m'y essaie, même si j'en suis au tout-tout début et loin de pouvoir distinguer autre chose que des différences flagrantes. Mais il faut bien commencer quelque part.
J'ai eu un mal de chien à trouver la petite bête qui se cache au centre de la photo,
celle là-même responsable de l'oxydation de l'Oriental Beauty...
Et pour cause ! Qui dit pesticide, dit absence d'insectes...
Akira tenait particulièrement à ce que je partage cette technique, mais surtout que les amateurs soient conscients de cette notion de direction, que l'aftertaste renvoie à la gorge. Il y aurait encore mille choses à dire sur le sujet mais chaque chose en son temps. C'est par cela que nous avons commencé notre "entrainement" malaisien et ces quelques jours passés en compagnie d'Akira auront beaucoup mis à contribution notre odorat et cette recherche de direction, à apprécier d'abord par le nez les différences "d'angles" entre des thés de base et d'autres très haut-de-gamme. Evidemment, nous n'avons pas fait que sentir les thés...
Akira s’entraîne tous les jours de façon à être le plus efficace possible quand il va sélectionner son thé. Quand il arrive à la veille d'une rencontre avec un producteur, à l'instar d'un chanteur professionnel qui économiserait sa voix, il fait attention à son nez, à la clim' de l'hôtel, il se repose, car le goût comme l'odorat est très influencé par la fatigue, ce qui n'est pas évident à gérer en cas de fort décalage horaire. Bref, il soigne son nez car c'est lui qui sera mis à contribution pour sélectionner ce qu'il va acheter. Et vu le résultat, on va dire que ça marche selon moi plutôt pas mal...
À bientôt !
Aha, très intéressant, comme toujours ! Il faut que j'essaye !
RépondreSupprimerTrès juste.
RépondreSupprimerUn thé sans After Taste ce serait comme du Jazz sans basse ou contrebasse.Le socle la base le poids à l'horizontal,à plat mais tout en profondeur et vertiges.
Merci pour ces précisions.
Je note sur mon carnet : à méditer et à expérimenter en profondeur.
RépondreSupprimerMerci de cet article inattendu et fluide.
A++
Nicolas
Intéressant que tout cela. Je m'étais fait ce genre de réflexion avec quelques digestifs (mais formulée moins bien), mais j'ignorais cet aspect général. Un truc de plus à essayer !
RépondreSupprimerC'est très intéressant et instructif.
RépondreSupprimerA vrai dire c'est plus ou moins comme ça que je juge aussi un thé à partir de feuilles sèches, sauf que j'avais jamais vu ça comme une direction (horizontale ou verticale) mais plus comme le lieux ou le thé va s'exprimer (fosse nasale, gorge, les deux), ce qui finalement revient à peux près au même...
Par contre c'est peut être bien quand mme de rajouter que c'est une technique, et n'est pas toujours à prendre au pied de la lettre. Comme toute technique c'est efficace, ça permet d'aborder les chose d'une manière différente, et donc d'aller plus loin et c'est très bien, mais ce n'est une vérité en soit à suivre aveuglément.
Pour les puerh notamment, et en particulier lorsqu'ils sont un peu vieux, un certain nombre de thés s'exprime très différemment par l'odorat et une fois qu'on les boit, surtout avec des feuilles sèches. Si dans la majortié des cas, en particulier pour les jeunes thés une analyse à l'odeur permet de cerner le thé, on a quand mme parfois de grosses surprises en infusant par exemple un thé qui semblait pas prometteur du tout au premier abord...
bref c'est très bien de s'armer d'un maximum de technique, comme ces très bon conseils d'Akira, mais c'est bien aussi de se rapeller que ce ne sont que des techniques, que parfois la vérité défie...
Très instructif, d’autant que je me fie plus à mon nez qu'à mon palais.
RépondreSupprimerMerci :-)
Merci à tous pour vos messages.
RépondreSupprimerOlivier, je suis on ne peut plus d'accord avec toi. Le nez aussi peut donner de mauvaises informations. Akira pense qu'avec un entrainement soutenu, il est possible d'éviter la plupart des pièges, mais confirme à la première occasion ses impressions avec de l'eau chaude. Ce n'est peut être pas une technique absolue, mais quand on part de rien, s'arrêter pour sentir les feuilles en essayant d'en retirer le maximum d'info est un exercice bénéfique pour un amateur de thé, de vin... Et dieu sait qu'un spécialiste pourra dire beaucoup de choses sur un vin rien qu'au nez, donc j'imagine aussi pour le thé avec l'habitude.