jeudi 28 mars 2013

Quick Review (13) : Master Xu's Rou Gui 2012 (Postcard Teas)






Les Rou Gui de Master Xu compte parmi mes yancha préférés. Je suis très content à l'idée de goûter cette version 2012. Un yancha, c'est souvent mieux après quelques années. Mais quand la torréfaction est littéralement faite de mains de maître, c'est un énorme plaisir à boire quel que soit l'âge...








Ces feuilles proviennent de théiers poussant sur la même falaise que les six arbres mères Da Hong Pao : Jiu Long Ke (Nine Dragon Nest).




Postcard Teas ©




L'aspect extérieur des feuilles est parfait. Pas une brisure, de magnifiques torsades marrons.

L'odeur va au-delà de la simple torréfaction, avec un pôle fruité sous la première couche de notes de cacao, noisettes...




Nouveau chahai assorti... Depuis le temps que je le désirais celui-là...




Paramètres 7 grammes de feuilles, pour 3-4 passes en gaiwan avant de les transvaser dans ma Ba Le. Dans le zhong chaud, ce sont de magnifiques effluves chocolatées qui me montent aux narines. Une fois, rincées, le tableau se complète d'une forte minéralité, de notes fruitées (poire) et fleuries (rose). Petite pointe d'amande également. Su-per-be !








Première passe assez courte, donc légère, très minérale, avec une montée en puissance du fruit au bout de quelques instants. Les notes pyrogénées ne sont pas ultra présentes, loin de là. Les sensations de gorge sont excellentes. L'énergie de ce thé est remarquable. Sa longueur se concentre pour le moment sur le cacao avec une finale sucrée qui tire sur la vanille et le caramel. C'est très gourmand.








La Ba Le n'a pas un rendu extrêmement différent du zhong et c'est pour ça que je l'aime tant : elle ne perturbe pas l'équilibre du thé. Mais elle va me permettre de puiser bien plus ce qu'il y a dans ces feuilles. Plus longtemps, plus chaud. Et puis, il y a ce confort, cette sérénité lorsqu'on emploie un objet qu'on admire et respecte tant.









Petit à petit, les infusions s'enchaînent. La liqueur, soyeuse à souhait, s'installe sur des saveurs de vanille et d'eau de rose. Quelques notes d'agrumes (mandarine).









Cette belle dégustation s'est achevée après un bon nombre d'infusions, je dirais une quinzaine au bas mot. La Ba Le a bien fait son job et a extrait la substantifique moelle de ces feuilles jusqu'à la lie. Une magnifique dégustation qui aura duré 3 jours.









Assurément, ce Rou Gui 2012 est un grand cru, tel que l'a été par exemple le 2009 dans mes souvenirs. Sûrement un très bon potentiel de garde.


À bientôt !







mardi 19 mars 2013

Kaikado






Kaikado est la référence des "Chazatsu" au Japon. Toujours imitée, jamais égalée, comme le dit l'adage bien connu. Ces boîtes qui mettront vos feuilles à l'abri de l'air et de l'humidité sont faites entièrement à la main grâce à un savoir-faire qui remonte à plusieurs générations (depuis 1875 pour être précis). La maison impériale utilise encore des anciens modèles Kaikado.









Bien qu'il existe quelques revendeurs de ces boîtes, notamment ceux qui ont participé à une collaboration avec Kaikado (à ma connaissance Ippodo et Postcard Teas), j'ai eu la chance l'année dernière de me rendre dans leur boutique à Kyoto. Elle ne paye pas de mine de l'extérieur, mais renferme des trésors pour l'amateur de sencha.
















Il existe trois couleurs de boîtes qui, en vieillissant, changeront significativement. Voici ce que ça donne :





Les boites en étain (argentées) noircissent...





Les boites en laiton (dorées) deviennent roses...





Les boites en cuivre s'assombrissent et se patinent...





Le cuivre évoluera en quelque mois seulement, le laiton en un an ou deux, enfin l'étain mettra plusieurs années à noircir. J'ai personnellement choisi une boîte en laiton. Voici ce que ça donne.





4 mois après l'achat...




1 an après...





À noter que plus on l'utilise, plus le changement sera rapide. En effet, c'est l'humidité qu'on a sur les mains qui contribuera grandement à l'oxydation des matériaux du Chazutsu. Plus on la caresse, plus elle changera rapidement. 

Voici une photo de l'intérieur du couvercle que je ne touche pour ainsi dire jamais.





encore doré comme au premier jour...








Ces petites boîtes nécessitent plus de 130 étapes de fabrication. Voici deux vidéo qui donnent une petite idée du processus :










Admirez ici la précision du travail manuel :





les deux finitions, une simple et une qui chasse l'air...




Petite cerise sur le gâteau, la petite "scoop" (cuillère ?) pour servir le thé, ici personnalisée à mon nom (c'est gratuit...) :






l'artiste dans en train de graver mon nom sur ma "scoop"...




Pour finir, voici quelques liens intéressant qui parlent du sujet :

- le site officiel tout d'abord avec une partie en anglais,
- un article en anglais fort bien illustré et documenté (avec une autre vidéo),
- un article d'un blog français qui en parle.


Merci, et à bientôt !


PS : à côté de la boutique Kaikado à Kyoto se trouve un petit sento (bain public) de quartier on ne peut plus traditionnel, moment de détente assuré.

mardi 5 mars 2013

Coups de Coeur 2012 (2) : Da Xue Shan 2010 (Hojo Tea)






Voici le deuxième thé que j'ai sélectionné parmi mes coups de coeur de l'année 2012. J'en ajouterai bien un troisième si j'ai le temps. Il y a tellement de thés dont j'aimerais parler en ce moment... Il s'agit d'un puerh sauvage. Ça ne signifie pas qu'il soit ancien, juste qu'il n'est normalement pas cultivé par la main de l'homme. Avec la permission d'Akira, voici une illustration tirée de la page qui parle de ce thé.








À gauche, un théier domestiqué, qui ressemble l'un de nos arbres fruitiers. À droite, un arbre sauvage, comme un arbre typique de forêt. Ici, il est visiblement vieux, mais ce n'est pas pour ça qu'il faut confondre les deux !

Mais revenons à notre thé. Un puerh sauvage donc. Pour ceux qui ne connaissent pas, ça change beaucoup du puerh sheng classique. D'apparence plus foncé, on trouve parfois des feuilles plus claires dans le mélange, dont la couleur varie du jaune au rouge, nommées Huang Pian. Ce sont soit de vieilles feuilles qui sont ramassées lors de la récolte afin d'encourager la pousse de jeunes bourgeons, soit la troisième feuille du quatuor "bourgeon + 3 feuilles" qui jaunit au cours du sha qing

Toujours est-il qu'elles sont la plupart du temps triées, et souvent récupérées et pressées sous forme de brique. Mises à bouillir, ces feuilles livrent une liqueur assez douce. Mais au prix de certains maocha, elles sont parfois laissées... La brique de Huang Pian coûte dans les 5 RMB/kg, le prix d'un maocha de gu shu (vieil arbre) peut atteindre 500 RMB/kg, je vous laisse faire le calcul...

Ici, il y en a. Je ne crie pas au scandale,  car il me semble que ça se fait avec ce genre de puerh sauvage. Je vous laisse consulter cette article de Sébastien (et ses commentaires) sur une galette de Terre de Chine.








Très différent donc d'un jeune sheng de la même année. Les parfums sont boisés et fruités, avec une pointe de fumé et de réglisse. Il y a aussi un aspect herbacé. Quant au fruité, il est assez complexe, j'ai du mal à le cerner avec précision pour le moment.








J'ai prélevé 8-9 grammes de feuilles qui vont d'abord atterrir dans mon zhong préféré avant de poursuivre dans ma superbe théière Shui Ping en zini d'Essence of Tea qui, comme nous allons le voir, se marie particulièrement bien avec ce thé (et pas uniquement).








Dans le zhong chaud, j'ai droit à une jolie alliance de fruits, de bois et de cuir. Rincées, on se retrouve plus sur un terrain connu, avec des notes végétales, une pointe de fumé. Le bouquet dans son ensemble est très sucré et frais. Je retrouve enfin sous le couvercle du zhong, puis ensuite dans les feuilles en elles-mêmes cette petite note si addictive qui fait à mes yeux l'intérêt principal des puerh sauvages et particulièrement de ce thé très équilibré, sans pour autant parvenir à la décrire avec précision. C'est assurément fruité, rappellant certains agrumes, également exotique à n'en point douter, mais marié à une composante boisée, fumée et herbacée. 








Je ne vais pas vous mentir, les premières fois, ça peut être très surprenant ! Mais un peu comme le durian, ce qui semble parfois assez difficile lors de la première rencontre, peut devenir très addictif par la suite. Comme le dit l'adage bien connu : "y a que les imbéciles qui changent pas d'avis !" Addictif, voici un mot qui correspond bien à ma relation avec ce thé.








J'ai tendance à laisser infuser ce puerh un peu plus longtemps que la moyenne. Il ne produit pas d'amertume et le rendu est rond et sucré. Le système respiratoire est immédiatement envahi d'une sensation de fraîcheur. En bouche restent pendant des lustres des sensations fruitées, melon, raisin, agrumes. Il y a le fumé aussi, qui peut-être en dérangera certains, pas moi en tout cas.









Néanmoins, c'est aussi un peu à ça que va servir ma petite shui ping en zini. Sa terre souple de qualité va lisser admirablement les jeunes sheng pour leur conférer une texture suave, atténuant le rendu immédiat, mais conférant une longueur supplémentaire. Non que ce thé en ait particulièrement besoin, sa longueur étant déjà extra, mais elle gommera de plus un peu le fumé de ce thé, tout comme elle gommerait la torréfaction d'un oolong, ou arrondirait les angles d'un puerh cuit ou d'un vieux puerh cru.








Je la consacre aux jeunes sheng, souvent dosés plus que généreusement. Cette théière n'est pas précieuse à mes yeux comme une vieille yixing, mais justement, c'est pour ça que je l'aime tant. C'est une baroudeuse qui m'accompagne parfois à l'extérieur, sur un coin d'évier, etc. Elle n'est pas d'une finesse extrême, mais elle est toujours performante. Et je ne l'économiste pas. Bref, le courant passe bien entre elle et moi, vous l'aurez compris.








Pour terminer avec ce thé, il vous accompagnera très longtemps tant sa longueur est incroyable. Les infusions se succéderont sans que vous y prêtiez attention, et le plaisir accompagnera chaque tasse. C'est du moins mon cas. 


À bientôt !