samedi 31 juillet 2010

Puerh by Nada





Bangwai, Bulang
Manmai, Banpen, Mansai




Je viens de recevoir une commande passée au printemps dernier. Les galettes de David Collen de The Essence of Tea (aka Nada) de l'an passé avaient bénéficié d'un très bon accueil, en particulier de la part de Hobbes de Half-Dipper, une référence dans le monde du puerh anglophone. Elles avaient cependant été pressées en petit nombre et ceux qui n'avaient pas pré-commandé avaient du se contenter d'échantillons. D'où mon choix cette année de m'y prendre à l'avance et de pré-commander.

En fait, toutes ces galettes sont disponibles à la vente. Vu leur coût raisonnable, je me suis dit que ça valait le coup d'investir dans l'optique de les stocker et d'espérer qu'elles vieillissent bien. Une bonne occasion de parler un peu de ma relation actuelle avec le jeune puerh.



La flambée des prix sur le puerh est une réalité (allez voir par vous-même les nouveaux prix des puerh à la maison des 3 thés pour vous en rendre compte) et elle n'est pas partie pour s'arrêter, y compris pour les jeunes sheng (de qualité) d'après une discussion avec Olivier qui est selon moi très bien placé pour en parler (cf. son interview avec Cheng Sheng He.)




Bulang

(£40/400g)



Alors, on pourrait parler pendant des lustres des conditions de stockage en Europe. Personnellement, je trouve tout cela assez stérile. Ce qui compte ce sont les conditions de son chez-soi, les différences de température et surtout d'hygrométrie pouvant être énormes d'un logement à l'autre. Et malgré cela, on est encore dans l'inconnu.

Je pense que le meilleur conseil à suivre est celui donné par jeancarmet dans une de ses vidéos : acheter et ne pas se soucier du stockage plus que ça. Aussi, ne pas écouter ceux qui vont dire que telle galette donnera assurément un très grand puerh dans plusieurs années. Personne n'en sait rien et affirmer le contraire est a priori un pari audacieux, si ce n'est une démarche commerciale. Cela dit, il me semblerait logique qu'un puerh de bonne qualité ait plus de chance de bien vieillir qu'un autre plus médiocre.

Dans quelques années, nous aurons surement le recul suffisant pour parler du stockage domestique et quel thé est à privilégier. D'ici là, je suis personnellement le conseil cité plus haut : j'achète, je stocke.





Bangwai,
village perdu non loin de Jingmai.

(£25/400g)



J'achète des galettes régulièrement, en quantité raisonnable quand même, en diversifiant les provenances, les sources d'achat comme les lieux de production. J'essaie de choisir de la qualité. Je pense qu'il faut aimer le produit à la base pour avoir envie de le stocker. Je dis ça, mais je ne bois plus trop de jeune puerh. Il faut qu'il ait au moins 4-5 ans en général pour que je commence à l'apprécier. J'ai mes puerh à boire de suite et mes puerh qui j'espère vieilliront bien. C'est peut être prendre un risque, mais qui pourra se payer un puerh de 5 ou 10 ans d'âge dans quelques temps ? Encore une inconnue de plus...





Mansai,
village perdu dans le secteur de Bulang.

(£25/400g)



Je n'écris pas ça pour inspirer une sorte de parano. Ce n'est pas un conseil pour encourager quiconque à faire de même. Une bouteille de vin achetée aujourd'hui, correctement stockée, vaudra X fois plus dans 5, 10 ans. C'est la règle. Si on veut boire du bon vin, il faut soit y mettre le prix, soit stocker à l'avance. Il en va de même pour le puerh. Sauf que l'inflation est ici inconnue. Cela dit, on peut gouter en cours de route pour essayer de suivre voire de comprendre l'évolution (hors achat en tong, bien entendu.)




Manmai

(£25/400g)



Je ne m'aventurerai pas à vous donner de suite mes impressions de dégustations de ces jeunes galettes. C'est encore du très jeune. Et à cet âge là, ça bouge beaucoup, surtout au début. Après en avoir prélevé un petit peu, j'ai mis mes galettes au fond du placard (à l'abri de la lumière, des odeurs, des chocs thermiques.) Elles vont y passer quelque temps avant de les regouter, et observer leur évolution. Je dirais juste que selon mes critères, c'est de la qualité à n'en point douter.





Banpen,
Village à moins de 4km de Lao Banzhang, souvent vendu en tant que tel.

(£20/250g)



Dormez mes petites galettes, dormez bien. Avec un peu de chance, vous m'offrirez des heures de bonheur dans quelques années...






À bientôt !



PS : désolé, la qualité de certaines photos laisse à désirer lorsqu'on zoome...


mercredi 14 juillet 2010

Série Wulong (1) : forte torréfaction et porcelaine








Voilà un moment que je n'avais rien écrit, ou plutôt que je repousse la date de publication. Chaque nouvelle infusion fait un peu progresser, donne de bonnes et de mauvaises idées, toutes dignes d'être considérées, testées. Aussi, j'ai toujours peur que ce que je vais écrire, alors que j'ai l'impression d'être satisfait de moi, ne se voit contredit ou amoindri par une nouvelle expérience.

Telle est la voie du thé : sinueuse, faisant parfois demi-tour, donnant sur une impasse ou du moins c'est ce qu'on croit, car une revisite pourra faire apparaitre de nouveaux sentiers.

Tout change. Les goûts changent, les envies changent, le palais change. Et dans ce mouvement perpétuel, une idée, un avis n'est que le reflet d'une position à un instant "t". Dans dix ans, avec de l'expérience, je reviendrais peut-être exactement au même endroit de ma voie : les mêmes goûts pour les mêmes méthodes. 

J'en profite pour rappeler que ces articles et ce blog n'ont nullement vocation à enseigner une façon, encore moins la façon. C'est un ensemble de balises sur ma voie du thé, de façon à pouvoir la revisiter et considérer avec du recul le chemin emprunté et parcouru. Et bien entendu, c'est un espace de partage dont le retour d'expérience de chacun permet de façonner ses propres choix.









Je commence une série de billets sur les wulong. Pour débuter, je vais m'intéresser aux spécimens très torréfiés et leur infusion en zhong. Cela parait très pointu mais ce n'est pas un hasard.


J'ai mis du temps à apprécier ces wulong, faute de préparation appropriée. Ces thés très travaillés, à 100% ou pas loin pour ceux dont on va parler aujourd'hui, ne me rendaient auparavant que des notes de torréfaction diluées, que je n'apprécie pas vraiment. Le café anglo-saxon, très peu pour moi !





J'ai souvent lu que le mieux était d'utiliser une glaise pourpre, zisha, souple et poreuse, pour arrondir les angles de ces thés. Je me suis acheté une telle théière et fait des tests. Le résultat ne m'a pas convenu. Efficace pour lisser certaines aspérités, ce "filtre" n'est cependant pas réglable et cela se fait aux dépends de détails et de certaines notes, ce qui me dérange ne serait-ce que philosophiquement : j'ai peur de passer à côté de plein de choses. Je ne prétends pas cependant que cette terre soit mauvaise. Je ne lui ai pas encore trouvé de domaine de prédilection. J'y reviendrai. Il est en effet toujours intéressant de pouvoir essayer un nouveau thé dans une telle théière.





Ensuite, j'ai essayé d'autres méthodes d'infusion, sans que rien ne me convienne vraiment. Ce que j'ai trouvé de mieux au bout du compte : le zhong. Comme quoi des fois il ne faut pas chercher bien loin... Comme d'habitude, les avantages de cet instrument sont multiples : on peut surveiller la liqueur, sa couleur, son odeur. Mais j'ai trouvé qu'en plus, ces wulong très torréfiés réagissaient particulièrement bien à la porcelaine. Ces thés déjà ronds n'ont rien à redouter de cet instrument qui accentue des fois les angles de certains thés trop fougueux. Les parfums sont rendus de façon très précise et quand on a sous la main un thé à la torréfaction très bien maitrisée, c'est un vrai bonheur.


Voici les détails de la préparation type que j'effectue pour ces thés :





Un dosage généraux, 4-5 grammes pour un zhong de 10cl. J'ai trouvé qu'il fallait mieux être généreux, pour éviter l'effet "café dilué" évoqué plus haut. Le dosage est actuellement au centre de mes réflexions. Je développerai plus dans un prochain billet.

J'utilise mon zhong de Terre de Chine pour ces thés, car c'est celui que je possède qui a les parois les plus épaisses et qui est donc susceptible de conserver au mieux la chaleur. Il faut si possible qu'il reste toujours chaud. De plus, les wulong supportent assez mal les interruptions d'après mon expérience, aussi il ne vaut mieux pas que le matériel refroidisse, ou alors il faut le repréchauffer. Je ne le fais que pour le zhong par contre et pas pour la cruche ni les tasses. J'aime boire mon thé à une température pas trop élevée, mon palais étant sensible à la chaleur, et je dois avouer qu'il m'arrive même de transvaser mon thé d'une tasse à une autre afin de le faire refroidir plus rapidement. Je perds peut-être des choses ce faisant, mais mes papilles sont plus précises à température plus faible.





Il faut donc bien préchauffer son zhong à l'eau bouillante. L'un des meilleurs moments de ces thés sera de sentir l'odeur des feuilles sèches dans un zhong brulant, mais je vous conseille de faire de même quelque soit la variété que vous infusez, en zhong ou en théière, dont la forme influera sur le ressenti. Un rinçage rapide (avec l'eau utilisée pour préchauffer le zhong par exemple pour pas gâcher) et on est parti !





Petite parenthèse sur le rinçage : autant avant j'avais tendance à rincer tout mes thés (sauf les verts,) autant à présent je ne le fais que sur les thés fermentés (et donc les puerh.)





J'utilise une eau à température maximum. J'attends juste qu'elle se soit calmée après ébullition. J'effectue la première verse avec virulence, pour faire tourner les feuilles afin qu'elles s'ouvrent mieux. Les autres seront faites délicatement pour ne pas brusquer les feuilles ouvertes, surtout au début.





Pour la durée d'infusion, je n'utilise plus qu'un seul principe avec le zhong : je soulève le couvercle et arrête quand ce que je sens me plait. Je trouve que le couvercle est plus précis qu'une tasse à sentir et je me dis que cette méthode doit former mon nez à être plus précis. La couleur est aussi une bonne indication quand on connait bien le thé qu'on infuse.

Cela fait également partie de mes résolutions récentes d'essayer - à terme - de me passer de deux de mes accessoires : chronomètre et balance. Pour cette dernière, je m'amuse à essayer de doser mon thé au jugé dans une petite coupelle et pèse le résultat pour voir si je suis loin du poids escompté. Avec un peu d'entrainement, je devrais pouvoir m'en passer sous peu ! Restera le thermomètre. Chaque chose en son temps...





En gros, concernant mes temps d'infusion, cela dépendra vraiment des goûts. Même une liqueur très dense et forte aura un intérêt en la persistance et l'évolution en bouche. Mais il est intéressant de jouer avec ce paramètre et de faire la corrélation entre ce qu'on sent sous le couvercle et ce qu'on trouve en bouche.





Enfin, ces thés se prêtent magnifiquement aux infusions longues. Plusieurs heures, une nuit, tant qu'il y a de la matière à extraire, j'infuse !





Il faut à présent que j'élargisse ma gamme de cette famille de thé. J'en ai repéré quelques uns chez Essence of Tea qui devrait en recevoir de nouveaux la semaine prochaine. Pour le moment, j'ai le Tie Guan Yin torréfié de Stéphane, celui avec qui tout a commencé : sublime. À prix à peu près équivalent, le Tie Guan Yin 2 de Taïwan de la maison des 3 thés ne tient pas la distance. J'aime bien le Qizhong Oolong de Stéphane (Baozhong torréfié) mais je ne sais pas s'il est si torréfié que les autres dont je parle ici. N'hésitez pas à me donner vos impressions sur d'autres produits, je commence juste.





Ces wulong torréfiés sont vraiment des thés spéciaux qu'il convient de bien préparer. Je ne dis pas que ma méthode est la meilleure. J'en changerai peut-être plus tard, mais pour l'instant elle me satisfait.

L'intérêt de ces thés réside dans leur longueur en bouche et leur évolution qui peut durer plusieurs minutes.

J'ai encore un long parcours à faire pour comprendre bien ces thés. J'y reviendrai sûrement. Mais je tenais à les présenter car il est facile de passer à côté selon moi.





Voilà pour ce premier volet sur les wulong. Le prochain sera consacré aux Wuyi yancha (thés de rochers.)


À bientôt !