mardi 22 février 2011

Chao Zhou Teapots (1/4) - The Making of






 
Quand on évoque les théières chinoises, on parle souvent de Yixing, du nom de la région qui livra, jusqu'à l'extinction récente des ses veines d'argiles, les précieuses Zhuni, pour ne citer qu'elles.

Mais il existe aussi une autre source de théières, issues de la province du Guangdong et plus précisément de la montagne Feng Huang (Phoenix), là où poussent les arbres à Dan Cong. Il s'agit des théières Chao Zhou, du nom d'une ville de cette région. Elles sont faites avec de la glaise ayant la même composition que la terre qui fait pousser ces théiers de prestige.

Une de leur particularité est d'être tournées et non assemblées à la façon des Yixing. Après plus d'un siècle de pratique, les potiers du style Chao Zhou ont acquis une grande expérience et certains sont même à présent appelés à Yixing pour leur expertise.

En guise d'introduction à cette petite série, je vous propose quatre vidéos où on peut voir la magie qui opère des mains des potiers. Ici, la famille Zhang, père et fils.




Regardez bien les outils...




Bon ok, on aurait aimé avoir des sous-titres, surtout sur la fin...




Thanks Lu for this video !



Et ici (enfin une en anglais...)


Voilà pour cette première partie.

À bientôt.

mercredi 9 février 2011

Mi Di Raw Puerh de Hojo's Tea



Je ne me lasse pas de photographier cette bouilloire...




Il s'agit du haut-de-gamme de puerh vendu par Akira Hojo. Voici la page qu'il consacre à ce thé (en anglais.) C'est en discutant avec lui, de ses critères de sélection, qu'il m'a donné envie de gouter ses puerh. J'ai acheté son Mengku et son Lao Ban Zhang et il m'a offert un échantillon de ce Mi Di. Voici l'intégralité des notes prises lors de ma dégustation.




Jolies feuilles déjà brunes malgré leur jeune âge.




Il s'agit d'un puerh du printemps 2010. L'aspect des feuilles ne donne pas d'indice particulier, pas d'odeur remarquable, elles sont juste un peu foncées et pas d'un vert claquant comme on aurait pu l'attendre d'un puerh si jeune.

Dans le zhong chaud, les choses se confirment : j'aurais surement parié à l'aveugle qu'il s'agissait d'un puerh de 2 ou 3 ans. Mais ce n'est pas un puerh très avancé non plus.

Quelques secondes de rinçage, des odeurs très fruitées se dégagent.




Le matériel : à part la soucoupe sous le zhong, le set vient de chez Stéphane. 
J'adore l'utiliser avec mes jeunes puerh.




J'infuse ce thé en mode Yin, ie peu de feuilles pour des infusions allongées. Ici, j'ai utilisé 3g dans mon grand zhong qui doit faire 12cl utiles (15cl à raz bord.) J'infuse de plus en plus mes jeunes sheng ainsi. Je trouve que les grandes quantité de feuilles ne leur vont pas dans la majorité des cas.




Première infusion...




La première infusion, au jugé, essentiellement à la couleur, a duré 45 secondes. Elle est superbe : pure, fruitée, avec une excellente longueur. J'ai l'impression de boire un alcool mais sans l'éthanol. Je ne sais pas trop lequel. Le fruit auquel me fait penser ce puerh m'est connu mais je n'arrive pas à mettre le doigt dessus. Pruneau ? Peut être bien oui, comme un armagnac sans l'alcool. Mais il cache encore d'autres choses.

La liqueur n'est pas excessivement sucrée. Une petite astringence vient remplacer le fruit sur la fin. Les saveurs ont bien tenu 2 min en bouche. Ce n'est pas un dan cong, mais je reconnais là les critères de sélection d'Akira : une excellente longueur. À noter que ceci est son haut-de-gamme de puerh, à un prix quand même assez élevé de 21€ les 50g. Le tout est de savoir s'il les vaut.

Depuis que j'ai écrit ces lignes, Akira propose un nouveau puerh plus haut-de-gamme encore : un Bu Lang.




Seconde...




Deuxième infusion : 1 min : liqueur un peu plus foncée, plus orange que jaune. Même impression, celle de boire une gnôle de qualité mais sans l'éthanol. C'est liquoreux, riche, sucré sans excès. Il y a un aspect "fumé." Je m'en rends compte car je le rapproche instinctivement depuis le début à ma superbe galette de Lin Cang 2006 de Stéphane, et peut-être aussi de la TH240 de Terre de Chine.

Tout mon système ORL est maintenant imprégné de ce thé, ma salive en a le goût, je le respire. Peu astringente, cette infusion est tout aussi remarquable que la première. Je suis content de l'avoir faite Yin. Je pense qu'il y aurait eu superposition des saveurs dans le cas contraire, tellement ce puerh est riche. L'approche est bonne.




Troisième...




Troisième infusion : 1 min 30 sec. Une couleur toujours aussi foncée qui me fait me demander si je n'ai pas trop poussé. En tout cas, voilà encore un bon point pour ce thé : une infusion Yin conduit en général à peu d'infusions, les temps devant être allongés rapidement. Ici, à la couleur de la 3ème, je trouve ça très prometteur pour la suite. Peut-être trop forte justement. La bouche est plus muette, par contre la longueur est plus fruitée. L'aspect fumé tend à disparaître peu à peu.




Quatrième...




Quatrième infusion : 1min 30 sec : on va en avoir le cœur net ! Résultat : une liqueur à peine plus pâle mais plus terne arômatiquement. La couleur est un bon indicateur, mais ne fait pas tout... Pas si simple le puerh... Infusion pas inintéressante, mais pas autant que les autres.




Cinquième... si vous n'aviez pas deviné...




Cinquième infusion : 2 min 30 sec : on revient plus franchement vers le fruit. Ce thé est toujours d'une incroyable douceur. À noter que j'utilise (toujours) de l'eau de source faiblement minéralisée et également une bouilloire de qualité, avec une chauffe lente pour l'amener à ébullition.




Sixième...




La dernière infusion documentée ici sera la 6ème, non que ce soit la dernière que j'obtiendrai de ce thé. Il infusera encore de longues heures, notamment cette nuit. 5 min pour cette 6ème infusion. Il aurait été prématuré de croire ce puerh mort. Le concentré de fruit de la tasse est là pour le prouver. Certes on atteint pas la longueur en bouche des premières infusions, mais la texture et les saveurs sont très intéressantes.

De plus, comme je l'ai évoqué dans ma dégustation précédente, je me demande si avec les thés qui ont une grande longueur, la bouche ne sature pas après quelques tasses. L'astringence vient inhiber quelques glandes gustatives et on sent moins de choses. Est-ce pour autant qu'il faut rejeter l'astringence et trouver des moyens de l'ôter de la tasse (eau plus fraiche, théière) ? Non, je ne pense vraiment pas. Elle est une telle alliée pour la longueur et l'évolution des saveurs que je pense qu'il faut plutôt la chérir et l'apprivoiser. Bien entendu, trop c'est trop. J'en ai fait les frais sur un ou deux dan cong cet hiver.


EDIT : 7ème infusion : 3h : véritable jus de fruit. Excellent.




Cette soucoupe fait 15cm de diamètre.
Les feuilles sont assez grandes et robustes. Présence de nombreux bourgeons. Que de bons signes.




Que vais-je faire de différent la prochaine fois avec ce thé ? Pousser plus visiblement à partir de la 3ème. Définitivement rester en mode Yin.

Conclusion : Un thé de qualité à n'en point douter. Les feuilles ont une richesse et une complexité qu'un puerh standard n'a pas. Bien qu'on ne puisse trop rien dire de son évolution à venir, il est toujours plus probable que de telles feuilles donnent quelque chose de très abouti. À 108€ la galette de 357g (12.000JPY), ce n'est pas donné pour un puerh aussi jeune. Il faudrait plus d'une dégustation pour déterminer avec certitude s'il s'agit d'un bon candidat à l'achat. J'en commanderai surement quelques grammes dans quelques temps., pour me faire une seconde opinion. Ce fut un très bon moment passé en compagnie de ce thé dans tous les cas.




Une dernière pour la route...





À bientôt !


jeudi 3 février 2011

LVDT : new design

Un grand merci au photographe ainsi qu'à l'infographiste qui m'ont permis d'aboutir à cette nouvelle présentation de blog qui me plait beaucoup. Ça se paiera à coup de tasses de thé, entre autre...


À bientôt !

mercredi 2 février 2011

Song Zhong de Hojo Tea







Voici le milieu de gamme actuel que propose Akira Hojo pour ses dan cong. Environ 21€ pour 15g de thé, soit ici 7€ la dégustation. Ce n'est pas tous les jours que je me paye une session comme celle-là. Mais après une telle expérience, j'ai bien envie de recommencer plus souvent. Il ne s'agit pas d'un thé banal. On est plus proche d'un Côte Rôtie que du Côtes-du-Rhône ordinaire. Autant le dire tout de suite : pour moi, ce prix est parfaitement justifié. Bien entendu, on aimerait pouvoir acheter un tel thé moins cher, mais c'est tout simplement impossible. D'ailleurs, Akira a marqué dans son article qu'une fois son stock écoulé, ce serait fini et qu'il lui faudrait trouver un autre thé. D'où l'envie pour moi de "l'immortaliser" ici. Voici mes sensations prises en direct pendant la dégustation.




 
 Feuilles superbes, aucune brisure, un parfum très prometteur...




Protocole habituel : 5g dans un zhong de 10cl

Odeur des Feuilles Sèches : je n'ai jamais trouvé autant d'odeurs à des feuilles non hydratées : c'est pâtissier, on sent du miel, des fruits rouges ; on a une seule envie : les manger !

Odeur des Feuilles Sèches dans le Zhong Chaud : plus floral, style Zhi Lan Xiang. Étonnant ce revirement.

Bref rinçage. Ça sent super bon. En 5 secondes, la liqueur a pris une couleur orange pâle. Je vais infuser court au début.

Odeur des Feuilles Rincées : on est encore dans un registre plus floral. Ça promet...




Feuilles après rinçage...




Première infusion : 20 sec : les parfums du pot de réserve sont extraordinaires : je ne m'y connais pas assez en odeurs de fleurs pour identifier ce parfum, mais c'est un véritable bonheur. L'odeur est un peu "sucrée". Le pot conserve longtemps ces parfums, je n'en perds pas une miette puis passe aux feuilles dans le zhong qui sont un peu plus poivrées.

Le thé en lui-même n'est pas corsé. Il est doux et glisse dans la bouche. Au bout d'une quinzaine de secondes après l'avoir avalé, une douce sensation d'astringence vient porter son lot de saveurs. C'est plus subtil que le Mi Lan Xiang fruité, moins long peut-être mais plus fin. Ce que je sens me fait penser à des fleurs, mais je n'en suis pas sûr en fait. Il y a un aspect fruité mais je n'arrive pas à mettre le doigt dessus. Peu importe.

Je note que j'aurais pu pousser un poil plus, mais je n'aime définitivement pas les dan cong de ce type trop infusés. Les feuilles sont encore très peu ouvertes.




 Après la première infusion...




Je verse l'eau délicatement sur les bords du zhong pour ne pas choquer les feuilles. J'arrête l'infusion au bout de 40 secondes. Les parfums du pot sont enivrants à un point... Je n'ose trop utiliser de superlatifs et pourtant... J'attends un peu avant de boire cette seconde infusion. J'ai fait une erreur : ce thé a bien plus de longueur que le Mi Lan Xiang. Elle est juste plus discrète. J'attends encore un peu... et me lance.

Beaucoup plus fort, surement trop à l'attaque pour certains. Mais quelle explosion... À partir de là, je peux le dire sans crainte : j'ai entre les mains le meilleur dan cong que je connaisse. Un truc de fou. Peut être le meilleur thé que j'ai eu la chance de boire. Je ne sais combien de temps il va me falloir pour avaler la deuxième tasse de cette infusion, et après cela de passer à la troisième, tellement il y a de longueur. Quand on croit que c'est fini, on se rend compte que non, qu'il y encore quelque chose, ou bien est-ce quelque chose qui était là mais qu'on n'avait pas remarqué. 2ème tasse : fleur, très végétal, avec de la pêche blanche et de l'abricot. Superbe.

Bon alors combien de temps pour la 3ème ? Celle-ci était forte mais extra. Les feuilles sont loin d'être encore ouvertes. Allez, je me lance. Au feeling.




Interlude hivernal...



50 secondes. Je me noie dans les parfums du pot. Je dois bien y rester le nez collé deux minutes avant de me décider à tremper mes lèvres. Le temps était sans doute trop fort, mais je m'en fiche. Ce qui suit derrière est époustouflant. Mince alors, je vais bientôt manquer de superlatifs... J'essaierai quand même à la prochaine un temps plus court pour voir. J'ai l'impression de manger une fleur, un pistil jaune.

Je reviens pour la suivante à 20 secondes, pour voir. Les odeurs du pot sont plus fines. Comme souvent pour les wulongs, plus j'allonge, plus j'ai l'impression qu'un côté sucré se développe, venant couvrir la sécheresse de certains tanins. Je bois un peu d'eau fraiche pour "reset" ma bouche qui contient encore l'influence des infusions précédentes. Je devrais peut-être le faire plus souvent pour les thés avec une grande longueur. Je le note...

Bon ben cette infusion de 20 secondes est très honnête. Ce n'est pas les mêmes saveurs, c'est plus léger, plus séveux aussi, plus chlorophylé. Je suis sûr que certains préféreraient ce genre de résultat à mes infusions plus longues. Bonne tenue en bouche également. Et dire que les feuilles ne sont pas encore pleinement ouvertes... J'aurais peut être du me limiter à 4g pour celui-là.




 Après la quatrième...




50 secondes : temps médian. Bel équilibre des odeurs du pot. Quelle douceur en bouche... Ce dan cong est un bon terrain de jeu et offre des choses différentes en fonction de sa durée d'infusion, de quoi s'amuser.

À ce niveau de la dégustation, j'ai peur que mes papilles ne saturent, que je ne sente plus les mêmes choses, la même longueur.

Je vais essayer quelque chose. J'aime bien expérimenter. Je vais faire une infusion très longue pour ouvrir les feuilles et une très courte ensuite.

2 minutes : je n'ouvre pas le zhong avant de verser pour garder la chaleur. C'est un peu paradoxal : ces thés sont tellement longs en bouche qu'il faut attendre que l'effet ne s'estompe, et pendant ce temps, le matériel refroidit inexorablement. Je sais que ça se fait de tout re-préchauffer entre chaque infusion. Pourtant, je n'ai pas envie de le faire. La flemme sans doute. Et puis je suis déjà pleinement satisfait comme ça.

La liqueur est forte mais se boit. Mais j'ai aussi la sensation que mes perceptions ne sont plus celles que j'avais au début. On arrive sur du plus vert, comme si on mangeait des plantes, mais le tout étant très doux.

30 secondes : c'est bon aussi, mais à présent j'en suis sûr, mes papilles sont saturées et mes perceptions ne me permettent plus d'être précis. À moins que le thé ait perdu. Ou bien les deux phénomènes se superposent.

J'arrête ici. Je sais que les feuilles n'aiment pas les interruptions mais j'essaierai quand même. De plus, la flamme de mon bruleur vient de s'éteindre faute de combustible. C'est un bon moment pour arrêter. Et dire que les feuilles s'ouvrent à peine...




Grande nouvelle : le projet Japan 2011 est lancé !




Je reviens une heure après et ce n'est plus ça. Peut être ce thé avait perdu de sa force, ou peut être que les feuilles se sont amenuisées pendant cette heure sans infusion. Je ne sais pas. Ce n'est pas bien grave, ce que j'ai vécu restera comme l'une de mes meilleures expériences gustatives.


Ce que je changerais la prochaine fois avec ce thé : 4g au lieu de 5. Comme quoi, il y a toujours des exceptions. J'ai infusé une vingtaine de dan cong différents depuis que j'ai commencé, et ce dosage m'a toujours satisfait. Ce thé est vraiment unique. À bien y regarder, certaines feuilles ne sont pas du tout ouvertes. Je pense que même en mode "gong fu" il faut quand même laisser de l'espace pour qu'elles s'ouvrent un minimum.

Théière ? J'essaierais oui, ne serait-ce que par curiosité.



On remarque que les feuilles ne se sont pas totalement ouvertes, certaines sont même loin de l'être.




Conclusion : elle est assez visible de par l'emploi de superlatifs... Ce thé est un dan cong d'exception, dont le prix est pour moi en total accord avec le plaisir qu'il procure. Il vous donne envie de jeter tous vos thés bons mais pas extra et de ne boire que des choses du même acabit. Mais voilà, on ne débouche pas un Côte-Rôtie à chaque repas... Mais l'important est de savoir quel effet ça fait.


A bientôt !


Prochain article : Mi Di Raw Puerh de Hojo's Tea